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Les coptes, parias de l'islam
Ayant refuse de se convertir la conquête arabe en a fait des parias.
Une histoire qui dure depuis le VIIe avec des hauts et des bas.
Ayant toujours sur les lèvres une nokta (blague) pour réjouir ses hôtes « chrétiens » de l’Élysée ou de la Maison-Blanche, le général-président Hosni Moubarak présente le visage bonhomme d'une Égypte «pro-occidentale » et « tolérante ». La charia loi islamique, issue du Coran et de la Sunna (recueils des dits de Mahomet), est pourtant appliquée dans la vallée du Nil depuis l'invasion arabe de 640 et jusqu'à nos jours, y compris aux Coptes, chrétiens autochtones, sauf en quelques rares matières comme le mariage.
Privés peu à peu, sauf en liturgie, de leur langue maternelle, l'égyptien, du fait de l'arabisation du pays, se voyant interdit néanmoins d'enseigner l'arabe, les Coptes furent soumis par les Arabes à un impôt spécial, la djizya, n'eurent plus le droit de porter les armes ou de monter à cheval et furent, jusque vers 1850, des sortes de parias, situation dont on ne peut sortir qu'en passant à l'islamisme, ce que certains font encore à présent. Africains non négroïdes, non sémites, les Coptes, héritiers de la circoncision pharaonique, la communiquèrent ensuite aux Sémites, Israélites ou arabes, et n'ont jamais renoncé à cet usage hygiénique et religieux.
Au milieu du XIXe siècle, la dynastie égyptienne fondée en 1805 par MéhémetAli, esprit éclairé formé en Grèce ottomane par un Marseillais, ouvrit aux Coptes la porte des casernes et supprima l'humiliante djizya. Sous cette dynastie, renversée en 1952-1953, il y eut même trois chefs de gouvernement chrétien, un Arménien et deux Coptes, dont Boutros Ghali assassiné par un musulman hostile à la politique tendant à l'égalité entre chrétiens et mahométans, promue par les princes méhémetalides, lesquels reculèrent en 1934 lorsqu'ils réglementèrent sévèrement la construction des églises, celle des mosquées étant au contraire encouragée.
Sous le régime républicain, Nasser réactiva en 1956 l'interdiction faite aux Coptes d'enseigner l'arabe, «langue sacrée de l'islam», et cette mesure vexatoire n'a depuis lors pas été abrogée.
M. Zaki, né au Caire en 1944, vécut tout cela et, en 1966, il émigra en France où il obtint le doctorat en droit avant de dispenser cette discipline à Orléans, Dijon, Rabat et Paris-X. Son Histoire des Coptes d’Égypte(1), véritable somme, des origines à notre époque, est le fruit d'intenses recherches historiques, d'une expérience personnelle in vivo et d'un engagement jamais démenti en faveur de la « cause copte » dont nulle conscience internationale ne s'est jamais soucié - malgré, durant la seconde moitié du XXe siècle, les livres explicites de Jacques Tagher, d'Antoine Fattal, du père du Bourguet, de Christian Cannuyer, de Sami Abdib Abou-Sahlieh, et surtout de Jean-Pierre Valognes (2), diplomate français utilisant ce pseudonyme. La question des chrétiens d'Orient concerne aujourd'hui directement les Français de souche, sur le sol desquels se sont déjà installés par infiltration six ou sept millions de musulmans à démographie autrement dynamique que celle des « Gaulois », La question des chrétiens d'Orient concerne aujourd'hui directement les Français de souche, sur le sol desquels se sont déjà installés par infiltration six ou sept millions de musulmans à démographie autrement dynamique que celle des « Gaulois »,
En Égypte, groupés autour de leur pape -reconnu en tant que tel par le Vatican, au nom du principe: «Unité de foi, diversité d'administration » -, l'énergique Chenouda III, les quelque six ou sept millions de Coptes, représentant environ 10 % de la population égyptienne, n'ont toujours pas barre sur la vie politique, en dépit de la nomination depuis les années 1920 de ministres chrétiens «pour la galerie».
Sadate abandonna les Coptes à ses adversaires islamistes dont, certains, en province, rétablirent de facto la [i]djizya[/i]. Malgré une restitution partielle de leurs biens religieux aux Coptes,Moubarak ne s'est jamais vraiment penché sur leur cas, de peur d'irriter une opinion nationale vite hostile aux non-musulmans. Plusieurs massacres ont eu lieu, tandis que, fait unique dans les annales mahométanes, un musulman, Farag Foda, agronome connu pour ses écrits politiques libéraux, était assassiné au Caire en 1992, après avoir dénoncé le sort peu enviable de ses « compatriotes coptes».
Avec une plume tranchante comme la lame des égorgeurs islamistes, M. Zaki décrit avec une minutie parfois insoutenable la tragédie d'une « minorité solitaire », le « génocide lent » de sa communauté d'origine, soumise à la discriminante charia tandis qu'on bat tambour in abstracto sur les cinq continents en faveur des « droits de l'homme»..
JEAN-PIERRE PERONCEL-HUGOZ
1 commentaire -
« L’Islam est pour la musique qui véhicule un message positif »
Lien permanentpar Yacoub le 08 Mer Jan, 2014 8:05 pm
« L’Islam est pour la musique qui véhicule un message positif »
De l’avis de l’islamologue, Mactar Seck la musique fait partie de la
vie de l’être humain. Son caractère licite ou illicite dépend de
l’orientation qui en est faite. Aussi, il soutient que l’islam est
pour la musique qui véhicule des messages positifs.
Quelle est la position de l’islam par rapport à la musique ?
La musique fait partie de la vie depuis l’antiquité. La preuve, on
parle de musique orientale, africaine, occidentale.
L’Islam est une religion globale, qui parle de tout et qui touche à la
matérialité et à la spiritualité.
Dans la spiritualité, il y a l’aspect musical. Chez les soufis, le
rythme joue un grand rôle, et qui dit rythme, n’est pas loin de la
musique, du son.
Peut-être, c’est la perception actuelle de la musique qui pose
problème. Avant l’islam, le folklore jouait un rôle prépondérant, et
dans ce folklore, il y avait le rythme, qu’il s’agisse de la musique,
de la danse. Toute chose qui rythme la vie en général, a le sens
musical.
Quand l’islam est arrivé, le problème ne s’est pas posé parce que cela
faisait partie de la culture islamique. Avec la propagation de l’islam
jusque dans de grands pays comme la Perse, la musique jouait un grand
rôle dans la civilisation islamique.
Si l’on étudie l’islam en Andalousie (l’Espagne actuelle), on se rend
compte que l’islam allait de paire avec la musique.
A cette époque et jusqu’à présent, les grands intellectuels notamment
les écrivains, les poètes étaient de véritables musiciens. En
Andalousie, il y a des chansons rythmées par la musique. On trouve
aussi ce genre de musique au Maroc. Donc la musique fait partie de la
vie. En Arabie Saoudite, pays qu’on peut considérer comme le centre
culturel de l’islam, la musique joue un grand rôle même s’il y a des
différences au plan instrumental et des objectifs avec le monde
occidental.
C’est vous dire que l’islam n’est pas contre la musique.
Nous les islamologues ou soi-disant prêcheurs, nous avons des sujets à
développer, une mission envers la société et nos coreligionnaires. Les
autres ont aussi leur mission. Par le biais de la musique, ils
véhiculent un ou des messages. On n’a jamais attaqué la musique et la
danse.
Où se situe donc le problème ?
C’est durant ces quarante, trente voire vingt dernières années que le
débat s’est posé. Et cela fait partie de la lutte que des
islamistes-djihadistes mènent contre l’occident, et comme celui-ci
combat aussi l’islam....
Cette frange veut balayer tout ce qui est occidental dans le monde
islamique. Or, les gens doivent comprendre qu’il y a dans chaque
société deux tendances : les modérés qui acceptent la modernité et les
autres avec leur mentalité archaïque qui rejettent tout.
La musique est l'un des dons que Allah a faits à l'homme. Par elle, ce
dernier peut louer et remercier son Créateur, mais aussi exprimer son
émotion, ses joies et ses peines. Si le chant jouait un grand rôle
dans le culte de Allah, la musique instrumentale, elle aussi y avait
une place de choix. Non seulement, elle accompagnait les chanteurs,
mais elle complétait aussi leurs chants. Il n'est donc pas surprenant
que du début à la fin des Écritures, il soit très souvent question de
la musique instrumentale et vocale en rapport ou non avec le vrai
culte. (Gen.4/21.31/27,I Chroniques 25/1, Apocalypse:18/22.)
La première fois que la Bible parle de la musique, c'est à propos du
monde antédiluvien, au cours de la septième génération des descendants
d'Adam.
Elle déclare: "Jubal" fut la souche de tous ceux qui manient la harpe
et le chalumeau." Il peut être question ici de l'invention des
premiers instruments de musique ou de l'apparition d'une sorte de
profession musicale. - (Gen.4/21).
Il semble que dans les temps patriarcaux cet art faisait partie
intégrante de la vie des gens comme en témoigne le fait que Laban
voulait fêter le départ de ses filles et de Jacob en musique. (Gen.
31:27). La délivrance opérée à travers la Mer Rouge et les retours
victorieux de Jephté. David et Saül furent célébré par des chants et
des mélodies - Exode 15:20, 21.
Sur la base de recherches menées dans le monde entier, Kurt Sachs est
arrivé à la conclusion que "les choeurs et les orchestres attachés au
temple de Jérusalem témoignent d'une instruction, d'une habilité et
d'une connaissance musicale élevée". Il ajoute:"il est important de se
rendre compte que la musique du Moyen Orient antique était tout à fait
différente de ce qu'en ont dit les historiens du 19ème Siècle (...)
Quoique nous ne sachions pas quel son produisait la musique ancienne,
nous avons des preuves suffisantes des sa puissance, de sa dignité et
de sa maîtrise."
Au XXe siècle, l'Islam est un vaste monde, dont les liens avec la
musique sont variables. D'un point de vue technique, le noyau médiéval
arabo-irano-touranien de l'Iraq abbasside a induit les actuelles
musiques arabes, de l'Iran et de la Turquie, tandis que la musique de
l'Inde peut leur être apparentée par l'existence de modes
heptatoniques. Mais avec l'islam du Sud-Est asiatique, de l'Indonésie,
de l'Afrique noire ou de l'Amérique, on perd tout lien avec les
traités musicaux de l'islam médiéval. On peut donc distinguer la
musique de l'islam de la musique des musulmans.
Les chants propres à l'islamisme dépassent évidemment le cadre de
l'appel à la prière et du Coran sans atteindre le volumineux
répertoire des autres religions monothéistes. Il existe néanmoins des
chants de pèlerinage, des récits sur la vie du prophète,
d'innombrables chants à tendance religieuse, et des répertoires
propres aux mois du jeûne (ramadhân) ou du deuil chez les chiites
(muharrâm), avec, dans ce dernier cas, des cérémonies spécifiques
(tachabî en Iraq, âzâdârî en Iran) ou des représentations scéniques
(taziyè).
la psalmodie
On peut considérer que la psalmodie est à mi chemin entre le chant et
la parole. L'accent y est surtout mis sur le rythme, tandis que le ton
est monotone et répétitif. Alors que ce style continue à être encore
en vogue dans les autres grandes religions, la Bible laisse entendre
que son usage était limité au chants de deuil. Ainsi, David psalmodia
un chant funèbre en l'honneur de son ami Jonathan et sur le Roi Saül.
(II Samuel 1:17; II Chronique 35:25; Ezechiel 27:32:32:16). De fait la
psalmodie n'est préférable à la mélodie de la musique ou à la
modulation et à l'accentuation du discours verbal que pour le chant de
deuil ou la lamentation.
L'islam et la musique
La musique islamique est la musique religieuse musulmane, chantée ou
jouée en public ou en privé. La musique islamique est issue d'une
vaste région géographique qui s'étend de l'Asie centrale à
l'Atlantique constituent les branches d'une même famille musicale
ayant pris naissance dans les foyers culturels du Proche-Orient et du
Moyen-Orient1. L'Afrique sub-saharienne et les Philippines
méridionales possèdent aussi d'importantes communautés musulmanes,
mais ces zones ont moins d'influence sur la musique islamique. Toutes
ces régions étaient reliées par le commerce bien avant les conquêtes
islamiques du XIe siècle et il est probable que les styles musicaux
aient, tout comme les marchandises, traversé les frontières. Comme
l'Islam est une religion multiculturelle, l'expression musicale de ses
adhérents est différente et variée. Les modèles musicaux indigènes de
ces pays ont formé peu à peu une musique dévotionnelle appréciée par
les musulmans contemporains. L'attitude des branches sunnites et
chiites différe à l'égard de la musique. La première affiche une
interdiction mais une grande tolérance dans les faits, la seconde au
contraire favorise la musique mais l'interdit dans les fait. Cette
attitude contradictoire provient de l'influence exercée par les
confréries soufies, souvent adeptes de rituels liés à la musique
(dhikr et sama'). Certains musulmans pensent que seul le chant est
permis/licite (halal), et que les instruments sont interdits (haram).
Ainsi, il existe une forte tradition de chant a cappella emprunt de
Mélisme. Il n'y a pas une musique islamique mais plusieurs selon les
traditions des pays d'adoption. La musique arabe classique n'est pas
identique à la musique islamique car elle est profane. De plus, les
Turcs Seldjoukides, une tribu nomade convertie à l'Islam, ayant
conquis l'Anatolie (actuelle Turquie), et instauré le Califat (formant
ainsi l'Empire Ottoman), ont également eu une forte influence sur elle
mais la musique ottomane est elle aussi profane. Il en va de même pour
la musique persanne, par contre, on y retrouve les mêmes modes (Maqâm
ou Dastgah). En dépit de ses multiples apparences, cette musique, qui
appartient à la tradition orale, présente certaines caractéristiques
communes, surtout dans l'art de la musique savante de l’Islam ; cela
est moins évident dans les musiques ethniques, où les particularités
régionales sont marquées. Cet art revêt des réalités esthétiques voire
ethnomusicologiques variées marquée par le thème unificateur de
l’Islam, lequel s’est principalement exprimé en langue arabe
En 1926, l'écrivain égyptien non-voyant Taha Hussein fait exploser une
véritable bombe en rejetant l'idée selon laquelle la période
préislamique fut qualifiée d' "époque de l'ignorance". En fait, les
textes islamiques critiquent violemment cette période et les récits
des chroniqueurs ne nous ont apporté que de petites histoires et
quelques poèmes, pourtant l'écriture arabe existait bel et bien et
depuis plus de mille ans avant l'islam. Les recherches archéologiques
ont fourni des éléments montrant, depuis plus de trois mille ans, la
place des Arabes au Proche-Orient. Des textes cunéiformes
assyro-babyloniens, qui remontent à plus de 800 ans av. J.-C., parlent
des royaumes et des reines des Aribi (Arabes). Les villes, habitées
entièrement ou majoritairement par les Arabes, comme Pétra,
Philippopolis, Palmyre, Hatra, Doura Europos, Bostra, Hauran, Maïn,
Saba, Teima, Al-Hira et des dizaines d'autres ont laissé des souvenirs
éclatants ; ce qui ne laisse aucun doute sur l'existence d'une
civilisation arabe. Comment ce monde, construit sur (et entre) les
civilisations antiques de la Mésopotamie et de l'Egypte, aurait-il
versé dans cette "ignorance" ? Comment cette société arabe où se
développent les premières écritures, la poésie, les observations
scientifiques de l'univers, les questions métaphysiques, une réflexion
sur la vie (dont les traces écrites existent depuis trois mille ans
av. J.-C.), ce monde partagé entre zoroastriens, hébreux, chrétiens,
philosophes, polythéistes dont les cultes s'exprimaient déjà par l'art
(sculpture, peinture, musique, chant, danse), comment ce monde,
subitement, serait-il devenu "ignorant" ? Cette civilisation, les
écrits des historiens et géographes, comme Eratosthène (IIIe s.),
Ptolémée (IIe s. apr. J.-C.), Pline l'Ancien (Ier s. apr. J.-C.),
Strabon (Ier s. av. J.-C.) et d'autres, la confirment, et même les
textes bibliques (pourtant partiaux quant à ce qui sort du
nationalisme hébreux) ne nient pas cette vérité. D'autres historiens
contemporains considèrent même que cette civilisation existait avant
les anciennes civilisations gréco-romaine, byzantine et perse. Dans
l'introduction à son "Histoire naturelle", Pline l'Ancien découvre
trois régions : l'Arabie Pétrée (du nord-ouest du Sinaï à la
Transjordanie), l'Arabie Déserte (y compris le désert de Syrie),
l'Arabie Heureuse (au nord de la péninsule). Dans ces régions, on peut
diviser les Arabes en nomades du désert et en citadins. Les nomades
n'avaient pas de lieu fixe et vivaient principalement de l'élevage ;
la razzia (ou pillage éclair) faisait aussi partie de leurs activités.
Par contre, les citadins comme les Sabéens, les Nabatéens, les
Palmyréniens, les Ghassanides, les Hirittes et autres royaumes,
contrôlaient de vastes territoires et vivaient, en paix ou en guerre,
soit indépendants, soit agissant comme protecteurs pour le compte des
grands empire de l'époque (Perse, Romain, Byzantin, etc.). Ces
citadins travaillaient principalement dans le commerce, de l'Inde à la
Méditerranée. Leurs caravanes convoyaient l'encens, la gomme la
myrrhe, la soie, la résine, les pierres fines, toutes marchandises
précieuses venant du Yémen ou du Hedjaz, et la chose écrite. Elles
étaient souvent accompagnées et protégées par les tribus arabes du
Nord. La présence culturelle des empires mentionnés ci-dessus a
enrichi considérablement les traditions culturelles propres aux
Arabes. Grâce à ces contacts et échanges, mais aussi à l'ouverture sur
les mondes, à un esprit particulièrement inventif, les Arabes ont
poussé très loin l'évolution de leur culture. En ces temps, la poésie,
la musique, la danse devinrent le symbole d'une prospérité qui permit
à l'esprit de s'affirmer. A la fin du VIe s. et au début du VIIe s.,
juste avant l'apparition de l'islam, la plupart des Arabes étaient
donc juifs, chrétiens et païens, leurs villes vivaient dans une
certaine opulence ; la Mecque était un grand centre commercial,
religieux et culturel. C'est la tribu des Quraysh (prépondérante parmi
les Arabes de la région) qui était maîtresse de la Mecque depuis le Ve
s. Au niveau politique, elle était parfaitement et démocratiquement
structurée. Abd Al-Mutalib, grand-père du Prophète, était l'un des
principaux responsables de la ville. Ceux-ci organisaient deux foires
annuelles qui leur permettaient de contrôler les échanges et de gérer
l'enceinte sacrée entourant la Ka'ba, au centre de la cité, pour tirer
profit des pèlerinages polythéistes accompagnant les foires. La Ka'ba
était (avant la récupération musulmane) un temple orné de plus de 300
sculptures (idoles), elle servait de lieu de culte aux païens. Les
visiteurs des foires n'étaient pas uniquement arabes ; ils étaient
aussi perses, romains, byzantins et autres. Les Mecquois contrôlaient
la route caravanière (la route des aromates) et organisaient chaque
année deux grands voyages commerciaux vers le Sud et vers le Nord.
Plus de 1 500 chameaux (ce qui était grand pour l'époque)
s'ébranlaient à chaque voyage ? A cette prospérité économique
s'ajoutait une vie culturelle intense. Au temps des foires, de grandes
animations musicales et de danse s'organisaient, les rencontres et les
concours poétiques faisaient partie du calendrier. Les grands poèmes
du Souk A'kath (les Mu'allaquates) étaient chantés et suspendus sur
les murs du temple. Les chanteuses et chanteurs arabes, perses,
byzantins, avec leurs instruments, et en particulier le oud (luth), se
produisaient dans toute la ville, sur les places des marchés, chez les
nobles (leurs mécènes), et dans les cabarets. L'orientaliste Georges
Farmer ("The History of Arabian Music", p. 10-12) écrit qu'en plus de
leur système musical, les Arabes utilisaient le système de Pythagore ;
que nombreux étaient les rois, princes et nobles qui pratiquaient la
musique et le chant ; que la musique jouait un rôle déterminant chez
ceux qui prophétisaient et qu'à cette période, le harem clos
n'existant pas, la liberté de la femme était égale à celle de l'homme.
Parmi les dizaines de noms connus, on peut mentionner le nom
d'Al-Khanssa qui chantait ses poèmes avec accompagnement musical,
ainsi que la mère de Hatem Al-Taay. Le grand poète Al-A'sha, dont l'un
des poèmes est devenu mu'alaqua, était connu sous le nom de "Sanajet
al-arabe" (Harpiste des Arabes), et parcourait chaque partie de la
péninsule pour chanter et jouer de son instrument. Des dizaines
d'autres faisaient comme lui ; cette tradition sera reprise par des
poètes chanteurs espagnols et français qu'on appellera plus tard les
troubadours. En réalité, les Arabes de cette époque (sauf les
monothéistes) avaient compris qu'il n'y avait pas de vie (sous forme
de survivance individuelle) après la mort, donc ils se sont intéressés
à vivre leur présent, à aimer, à danser, à écouter de la musique et à
chanter, sans oublier le vin (qu'ils produisaient et faisaient aussi
venir de très loin). Grâce à la prospérité économique et à un mode de
vie hautement culturel, la poésie et le chant existaient dans chaque
maison. C'est dans cette ambiance que le Prophète Mohamed est né en
570.
Que s'est-il donc passé ?
Abd Allah, le père du Prophète Sidna Mohamed, meurt avant sa
naissance. Sa mère décède quand il a six ans. Mohamed voit survenir,
en 578, la mort de son grand-père, son protecteur, le puissant Abd
Al-Muttalib ; il a huit ans. C'est Abu Talib, son oncle et chef de
clan des Hashimites, qui l'adopte. Mais Abu Talib, pour des raisons
financières, n'est plus capable de continuer à assumer ses
responsabilités dans la ville. Le pouvoir économique des proches de
Mohamed se trouve diminué énormément. Son grand-père étant bigame,
c'est vers la tribu de l'autre épouse, ses demi oncles, que ce pouvoir
se déplace : Al-Abbas, les Bani Umayya, la branche la plus riche et la
plus puissante des Quraysh, mais aussi la plus cultivée dont le grand
chef était Abu Sufyan (né vers 565). Mohamed vit alors la pauvreté et
la perte du pouvoir. Tout laisse à supposer, contrairement à la
légende populaire, qu'il est déjà lettré et assez brillant. Il
commence à voyager et à travailler, dès l'adolescence, dans le
commerce. A l'âge de 25 ans, il se marie avec une dame veuve et très
riche (Khadija) pour qui il travaillait et il continue à faire
prospérer ses affaires. En 610, Mohamed ressent que Dieu se manifeste
par l'intermédiaire de l'ange Gabriel : c'est la Révélation. Après
trois ou quatre ans de silence, il annonce publiquement l'islam. Dans
les grandes foires de la Mecque, c'est en prose rimée, comme tous les
prophètes de l'époque, qu'il déclame le message divin. Les visiteurs
ne s'y intéressent pas, ils préfèrent écouter la poésie et les récits
des poètes chanteurs que les paroles de Dieu. Parmi ces ménestrels,
Al-Nadhr Ibn al-Hareth connaît un succès certain et attire tout le
public. Ce dernier (selon le chroniqueur Al-Mas'udi) a appris à
chanter et à jouer du oud à Al-Hira en Irak (Etat arabe sous
protectorat perse). Il raconte dans ses chants les épopées des anciens
empires et les grandes histoires d'amour. Donc le message du Prophète
ne passe pas ; c'est la solidarité collective des Mecquois et leur
culture arabe qui empêchent les progrès de l'islam. En 619, Mohamed
perd d'abord Khadija, sa femme et soutien financier, et ensuite Abu
Talib, son oncle et soutien politique. C'est une nouvelle situation
dans laquelle le Prophète se trouve très affaibli. Il comprend alors
que sa réussite dépend des rapports de force, autrement dit qu'il lui
faut trouver des alliés. Ses contacts avec les tribus de Al-Taïf
(ville au sud de la Mecque) ont échoué. Mais le Prophète trouve des
alliés à Yethreb, ville habitée par les Arabes juifs des Bani Quryza,
des Bani al-Nadhir et des bani Qaynuqa et les Arabes idolâtres des
tribus des Khazradj et des Aws. Les monothéistes contrôlent la vie
économique et administrative (politique) de la ville et menacent
l'existence des polythéistes Mais les deux tribus des Khazradj et des
Aws ne s'entendent pas. Il leur faut un personnage capable de les
unifier pour affronter les Juifs. Mohamed accepte ce rôle. En 622, il
émigre avec ses compagnons (à peine une centaine) vers Yethreb. Il
réussit à unifier les deux tribus en les faisant entrer dans l'islam.
Au début, il vit en paix avec les juifs ; plus tard, il les combat et
les chasse de la ville qui devient alors Médine. D'autres contacts ont
lieu : il s'agit des bédouins qui adoptent l'islam, renoncent au
nomadisme et se sédentarisent à Médine. Celle-ci devient la capitale
des musulmans, une place importante de regroupement humain et un
centre militaire. C'est en cette période qu'est instituée la guerre
pour la gloire de Dieu (djihad). Le Prophète, dont la puissance
militaire n'a pas d'égale en Arabie, organise des expéditions contre
les caravanes mecquoises, puis de petites guerres contre les Quraysh,
les juifs et d'autres. Cependant, tous les moyens étaient utilisés
pour détruire la culture arabe. Les sourates du Coran et du hadith
interdisent la sculpture, la peinture, la musique et attaquent
violemment les poètes. Dans la sourate 26, connue sous le nom Les
Poètes, versets 224-226, comme dans la sourate 31 appelée Luqman,
versets 6 et 7, le texte sacré critique violemment les poètes
chanteurs arabes et leur promet un châtiment douloureux. Cette
interdiction de la musique est exprimée aussi par la bouche du
Prophète à travers ses hadiths dont certains parlent de châtiment pour
ceux qui sifflent et battent les mains pour faire de la musique.
D'ailleurs, chez les musulmans, le sifflement est considéré comme
l'œuvre du diable. Al-Ghazali, dans son livre intitulé Ihya ulum
al-din, mentionne certains de ces hadiths (voir vol.2, p. 246). Iblis
fut le premier à moduler la lamentation et le premier qui a chanté ;
Chaque personne qui élève la voix pour chanter, Allah lui envoie deux
diables sur ses épaules pour le frapper de leurs talons jusqu'à ce
qu'il se taise. Dans le livre Sahih Al-tirmithi (vol. 1, p. 241), on
trouve que le Prophète a maudit le chant et les chanteurs. En plus, le
Prophète n'a pas hésité à légitimer l'acte de verser le sang des
poètes chanteurs. Parmi ceux-là, Al-Nadhr Ibn Al-Hareth : il fut
capturé et assassiné par les soldats de Mohamed en mars 624. Quelques
années plus tard, il ordonne la mort de trois chanteuses : Sarah,
Qarina et Arnab (voir la chronique d'Al-Tabari, vol. 3, p. 116-118).
En 630, il dirige une armée de 10 000 soldats et entre, presque sans
combat, à la Mecque (c'était une ville de commerce respectée par tous
ceux qui l'utilisaient, elle n'avait pas de vrais soldats). Il détruit
toutes les sculptures autour et à l'intérieur du sanctuaire parce
qu'elles représentent les divinités des païens. Pour s'assurer que
cette ville n'aura plus d'influence culturelle, il interdit le chant
et la musique ainsi que la poésie, sauf celle qui le flatte ou flatte
l'islam. En même temps, il chasse les poètes de la ville et permet de
verser le sang de certains poètes comme Ka'ab et Bujair (fils du grand
poète Zuhair ibn Abi Salma, auteur d'une mu'laqua). Au bout de
quelques semaines, Bujair, épuisé, se rend et se convertit ; son frère
résiste beaucoup plus longtemps mais, harcelé, ne pouvant faire
confiance à personne, il se rend lui aussi et achète sa liberté par
ses odes à Mohamed. Il devient impossible aux artistes et aux
intellectuels de dire ce qu'ils pensent. La Mecque devient une petite
bourgade sans aucune importance politique ni commerciale ni
culturelle. Mohamed meurt en 632, la lutte pour le pouvoir commence,
trois de ses quatre successeurs (connus sous le nom Al-Khalafa
al-Rashidun ou les orthodoxes) sont assassinés. Ces quatre successeurs
continuent cette même politique, d'un islam dur et strict. Le premier
calife, Abu Bakr, considérait comme parfaitement naturel que la
musique soit définie comme un "plaisir non autorisé". Plus grave : Al
Tabari rapporte que ce même Abu Bakr a donné son approbation à Muhajir
(gouverneur du Yémen) pour couper les mains et arracher les dents des
deux chanteuses Thabja al-Hadramiyya et Hind bint Yamin pour qu'elles
cessent de jouer ou de chanter. Cette position à l'égard de la musique
a été confirmée par les quatre grandes écoles qui dominent la vie
musulmane. Il s'agit des écoles Malékite, Hanafitte, Shafi'itte et
Hanbalitte. Encore aujourd'hui, un "chef" religieux intégriste
algérien, Ali Belhaj, déclare : "Je n'écoute pas de musique parce que
la Charia l'interdit". Que s'est-il donc passé ? C'est phrase par
phrase, mot par mot au long de dizaines de grands ouvrages qu'il faut
reconstituer le drame. C'est en refusant d'accepter comme une
évidence, comme une chose correcte, comme la seule chose à faire, un
assassinat (que les enfants intègrent comme juste, en apprenant
l'épisode par cœur, en récitant le texte sacré) que la vérité se
dessine au prix d'un dépassement du tabou. Comme dans toutes les
histoires humaines, on retrouve le vieil antagonisme "culture forte ou
pouvoir fort". Il est intéressant de se poser cette question inutile :
où en serait le monde aujourd'hui, quelle musique pratiquerions-nous
si, au VIIe s., un ordre militaire qui rêvait de conquêtes n'avait pas
dévasté une culture millénaire ? Il est tout aussi intéressant mais
très utile de se demander pourquoi le processus de destruction devrait
continuer ? Au nom de quoi, au nom de qui ?
Être musicien ou artiste est généralement méprisé par nombreux
croyants musulmans
Être musicien ou artiste est généralement méprisé par une frange de la
génération plus âgée des croyants musulmans.Les paroles du Prophète
(QSSSL), condamnant les artistes enclins à imiter l'œuvre du Créateur,
n'ont pas toujours été interprétées comme un rejet pur et simple de
tout art figuratif. Ils ont été nombreux parmi les islamologues à n'y
voir que la condamnation d'une intention prométhéenne ou idolâtre. A
la question de savoir si l'art figuratif est interdit ou toléré en
islam, il est aisé de répondre, sans la moindre hésitation, que cet
art peut parfaitement s'intégrer dans l'univers de l'islam pourvu
qu'il n'oublie jamais ses propres limites.
La musique était une préoccupation d'Avicenne dans l'affinement du
goût et développement affectif. Avicenne s'est en effet intéressé à la
musique, qu'il considérait comme nécessaire à l'enfant. Dès le
berceau, lui-même s'endormait au son de quelque mélodie. Cela
prédispose l'enfant à apprendre la musique par la suite, et cette
éducation du goût s'affinera au cours de l'étape suivante où l'élève
apprendra la poésie simple, à la prosodie facile, qui ravit son âme et
la transporte et l'incite en outre à aimer la vertu.(source)
Le Baron Bernard Carra de Vaux rapporte, dans le même ordre d'idées,
cette anecdote, dans son livre "Les penseurs de l'Islam". : " Un soir
quelqu'un frappa à la porte d'Ibrahim Mocouly. On le fit entrer.
C'était. un vieil aveugle. Le musicien le reçut fort courtoisement et
céda même à sa prière de lui faire entendre quelques morceaux de sa
composition. A son grand étonnement il se vit critiqué avec une
sévérité qui le surprit mais contre laquelle il ne protesta pas, les
remarques et les observations qu'il venait d'essuyer lui paraissant
parfaitement justes. A son tour, il pria son hôte de jouer et de
chanter quelque chose. Ce qu'il entendit alors dépassait tellement
tout ce qu'il avait l'habitude d'entendre ou de jouer lui-même qu'il
en demeura stupéfié. Il sortit de la pièce pour savoir si son épouse
et ses enfants avaient aussi bien que lui saisi la mélodie
extraordinaire. Quand il revint, il ne retrouva plus le vieillard.
Personne cependant ne l'avait vu sortir ; niais tout le monde avait
perçu son' chant... Mocouly comprit alors qu'il avait reçu la visite
de Satan en personne.
Phénomène assez récent, plusieurs formations contemporaines ont
approché le thème de Dieu, de la Foi religieuse par la musique, à
l'instar des adeptes du soufisme.
Que ce soit à travers le rap, la chanson pop, ces nouvelles
expressions musicales se répandent rapidement grâce à internet et des
concerts de proximité dans les pays de la ghorba. Citons Sami Yusuf
qui a été diffusé à Trafalgar Square (à Londres), Companions of True
Unity.Dans le Coran
- Allah a dit dans la sourate Louqman n°31 verset 6: « Et parmi les gens il y en a qui, dénués de science, achètent de plaisants discours pour égarer hors du chemin d'Allah et pour le prendre en raillerie. Ceux-là subiront un châtiment avilissant »
le compagnon Abdallah Ibn Mass'oud (qu'Allah l'agrée) a dit concernant ce verset: « Je jure par Allah qu'il s'agit de la musique ».(1)
Le compagnon Abdallah Ibn Abbas (qu'Allah les agrée) a dit concernant ce verset: « La musique et ce qui lui ressemble ».(2)
Moujahid ( grand savant parmi les suiveurs des compagnons a dit ) (mort en 104) a dit concernant ce verset: « La musique ».(3)
Dans la Sunna
le Prophète (que la prière d'Allah et son salut soient sur lui) a dit: « Il y aura des gens dans ma communauté qui vont rendre licite l'adultère, la soie, le vin et les instruments de musique ». (Rapporté par Boukhari dans son Sahih n°5590)
D'après Nafi', Ibn Omar (qu'Allah les agrée) a entendu un instrument de musique. Alors il a mis les doigts dans ses oreilles et s'est éloigné du chemin. Alors il m'a dit: Ô Nafi'! Est ce que tu entends quelque chose? J'ai dit: Non. Alors il a enlevé les doigts de ses oreilles et a dit: J'étais avec le Messager d'Allah (que la prière d'Allah et son salut soient sur lui) lorsqu'il a entendu une chose comme celle-ci et il a fait comme je viens de faire.(4)
D'après Anas Ibn Malik (qu'Allah l'agrée), le Prophète (que la prière d'Allah et son salut soient sur lui) a dit: « Il y a deux voix qui sont maudites dans l'ici-bas et dans l'au-delà: la voix de l'instrument de musique dans les moments de joie et la voix de la plainte dans les moments de malheur ».(5)
(1)(Rapporté par Al Hakim dans son Moustadrak n°3599 qui l'a jugé authentique et il a été approuvé par l'imam Dhahabi et il a été authentifié par Cheikh Albani dans la Silsila Sahiha vol 6 p 1017)
(2)(Rapporté par Boukhari dans Al Adab Al Moufrad n°1265 et authentifié par Cheikh Albani dans sa correction de cet ouvrage)
(3) (Rapporté par Ibn Abi Dounia dans Dham Al Malahi n°32 et authentifié par cheikh Omrou Abdel Moun'im Salim dans sa correction de cet ouvrage)
(4) (Rapporté par Abou Daoud dans ses Sounan n°4924 et authentifié par cheikh Albani dans sa correction de Sounan Abi Daoud)
(5) (Rapporté par Al Bazar et authentifié par Cheikh Albani dans Sahih Al Jami' n°3801)
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Tolérance et intolérance
1. Présentation de l'article "Tolérance et intolérance"
En dar al harb (la maison (ou terre) de la guerre), i.e. là où la loi
de l'islam ne s'applique pas), les musulmans affirment que l'islam est
une religion tolérante. Leur argumentation est basée sur le début du
verset 256 de la sourate 2 : "Pas de contrainte en religion", et sur
un fragment du verset 29 de la sourate 18 : "Quiconque le veut, qu’il
soit infidèle".
Or le Coran contient un certain nombre de versets contradictoires.
Cette difficulté est résolue par les exégètes et théologiens
musulmans, avec le système des versets "abrogés" (mansukh) et
"abrogeant" (nasikh).
La règle est alors "Quand deux versets se contredisent, le verset
révélé en dernier abroge (supprime) le verset révélé en premier".
Ce principe est contenu dans le Coran même, avec le verset 101 de la
sourate 16 ("Les abeilles"),: "Quand Nous remplaçons un verset par un
autre – et Allah sait mieux ce qu’Il fait descendre – ils disent: «Tu
n’es qu’un menteur. » Mais la plupart d’entre eux ne savent pas", et
le verset 106 de la sourate 2 ("La vache"): "Si Nous abrogeons un
verset ou que Nous le fassions oublier, Nous en apportons un meilleur
ou un semblable. Ne sais-tu pas qu’Allah est omnipotent?". Ainsi, pour
une majorité de commentateurs, les versets qui prêchent l’indulgence
ou la tolérance (les premiers dans l'ordre chronologique: période
mecquoise), sont abrogés par ceux qui prônent la violence sacrée
contre les infidèles (période médinoise).
L'article de Marie-Thérèse Urvoy pour le "Dictionnaire du Coran"
(Robert Laffont, Collection Bouquins, septembre 2007), est une étude
méthodique de la notion de tolérance.
Les positions de deux familles de commentateurs sont exposées. Ceux
qui affirment que le verset 256 de la sourate 2 ("Pas de contrainte en
religion") a été abrogé par le verset 73 de la sourate 9 : "Mène
combat contre les infidèles et les hypocrites et sois dur contre eux",
cette sourate 9 passant pour avoir été la dernière révélée. Ceux qui
pensent, en se référant à un hadith, que ce verset 256 de la sourate 2
ne concerne que les "Gens du Livre" (chrétiens et juifs), lesquels
peuvent vivre en dar al-islam (terre d’islam) avec le statut de dhimmî
en payant un tribut. La question de l'apostasie est abordée dans la
dernière partie.
Marie-Thérèse Urvoy est professeur d'islamologie, d'histoire médiévale
de l'islam et de langue arabe à l'Université catholique de Toulouse.
Cet article est édité sur le site "Studia-Arabica"
http://www.studia-arabica.net/spip.php?article22
"Notre-Dame de Kabylie" le publie avec l'aimable autorisation de
l'auteur et de "Studia-Arabica"
2. L'article " Tolérance et intolérance " par Marie-Thérèse Urvoy
Pour le Coran le seul péché irrémissible est la mécréance (kufr).
Jusqu’à une époque récente, personne ne contestait l’obligation
d’éliminer l’incroyant qui est à la base du jihâd, mais subsistait une
question : comment amener l’incroyant à la vraie foi ? La réponse
dépendait de celle qui était donnée à une autre question, d’ordre
théologique : l’incroyance est-elle créée par Dieu seul ou l’homme en
est-il responsable ne serait-ce qu’en partie ?
Aussi ne s’est-on pas tant arrêté aux passages coraniques montrant que
Mahomet ne devait pas exercer de contrainte sur les incroyants mais se
limiter à la prédication (16,125 ; 19,84 ; 25,52 ; 29,46 ; 50,45),
qu’à deux autres, d’une formulation différente. Le premier est le
début du verset 256 de la sourate 2 : « Pas de contrainte en religion.
» Le second est un fragment du verset 29 de la sourate 18 : «
Quiconque le veut, qu’il soit infidèle. » Les commentateurs débattent
pour savoir si cette formulation a une portée générale, comme cela
semble le cas si on prend ces fragments isolément, ou une portée
particulière si on les replace dans leur contexte (du Livre ou des «
circonstances de la Révélation »).
Ceux qui attribuent à la première sentence un sens général affirment
qu’elle a été abrogée par le verset 73 de la sourate 9 : « Mène combat
contre les infidèles et les hypocrites et sois dur contre eux » ;
cette sourate 9 passant pour avoir été la dernière révélée. En
revanche, ceux qui lui attribuent un sens particulier pensent, en se
référant à un hadith, qu’il ne concerne que les « Gens du Livre »,
lesquels peuvent subsister dans le domaine de l’islam avec le statut
de dhimmî et en payant un tribut. Ibn Kathîr (VIIIe/XIVe siècle) fait
la synthèse en estimant que le verset a bien été révélé à une occasion
particulière, mais que sa portée n’en est pas moins générale. Il
résume ainsi l’opinion commune : « N’obligez personne à embrasser
l’islam, car l’islam est clair et explicite, grâce à ses preuves, ses
signes. Et puis la guidance est de Dieu : si Dieu ouvre le cœur d’une
personne à Sa lumière, cette personne se convertit avec conviction, et
s’Il met un sceau sur le cœur d’une personne, sur ses yeux, ses
oreilles, pour la plonger dans un aveuglement, la contrainte n’est en
rien utile pour cette personne. » Il ajoute cependant un hadith selon
lequel un homme s’étant plaint au Prophète qu’il était contraint
d’embrasser l’islam, celui-ci aurait répondu de l’accepter néanmoins
car « Dieu allait le pourvoir en bonne intention et en foi pure ».
Ibn Kathîr n’envisage la seconde sentence que sous l’angle de la
rétorsion : elle « découle de la menace, dit-il, puisque la suite
immédiate est évidente : aux dénégateurs est préparé un feu aux murs
très épais ».
Dans ces conditions, la question de la possibilité de sortir de
l’islam ne se pose même pas. Quelqu’un qui a possédé la vérité et qui
veut la quitter ne peut être qu’un pervers passible du feu éternel (2,
27 et 217 ; 16, 106). Curieusement, le Coran semble hésiter, à
quelques versets de distance seulement, entre l’absolution après
repentir (3, 89) et le refus de toute rémission (3,90 ; 4, 137). Quoi
qu’il en soit, la vision coranique de l’apostasie est donc purement
spirituelle et se distingue ainsi de celle de l’Empire romain
constantinien et de l’Empire Byzantin, où l’apostasie était une
trahison civile. Elle se rapproche, en revanche, de celle du droit
ecclésiastique chrétien qui cherchait à établir des étapes de
réconciliation pour le repentant. La vision politique n’a été adoptée
par l’islam qu’ultérieurement, mais néanmoins mise sous l’autorité
d’un hadith : « Quiconque change sa religion, tuez-le. »
L’apostasie extérieure sous la contrainte, le sujet restant
intérieurement ferme dans sa foi, est absoute par un passage du verset
102 de la sourate 16, vraisemblablement interpolé mais correspondant à
la doctrine de la légitimité de la taqiyya (« dissimulation »).
Dès le début du XXe siècle, le grand mufti d’Egypte, Muhammad ‘Abduh,
avait considéré que le devoir d’exécution de l’apostat ne se
justifiait que tant que l’islam était une petite communauté dont les
défections auraient menacé l’existence même, ce qui n’était plus le
cas. Mais son successeur à la tête du mouvement salafî, Rashîd Ridâ,
était revenu à la doctrine classique. Actuellement, certains auteurs
se font une facile réputation de réformisme en se limitant à reprendre
la position de ‘Abduh.
par Marie Thérèse URVOY
Bibl. :
FRIEDMANN Yohanan, Tolerance and Coercion in Islam, Cambridge,
Cambridge University Press, 2003.
IBN KATHÎR, L’Exégèse du Coran, trad. H. Abdou, Beyrouth, El-Bouraq, 2003.
Article extrait du DICTIONNAIRE DU CORAN, (Robert Laffont, Collection
Bouquins, septembre 2007)
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Notons que le mot « islam » est donné comme issu de l'arabe « slam' » signifiant « résignation ». On note aussi que les partisans de l'islamisme sont nommés « islamites » et non « islamistes » comme c'est le cas aujourd'hui. Il apparaît très clairement que les termes « musulmans », « mahométans » ou « islamites » et sa forme moderne « islamistes », sont de parfaits synonymes. Ils veulent dire exactement la même chose (partisans de l'islamisme = mahométans = musulmans) et peuvent être employés indifféremment l'un pour l'autre.
Il n'y a pas, comme on cherche à nous le faire croire, les « bons musulmans » d'un côté et les « méchants islamistes » de l'autre.
Il n'y a que, d'un côté, les musulmans à qui le droit laïque et démocratique ambiant interdit de mettre en application CERTAINS préceptes de l'islam et, de l'autre côté, les musulmans qui ont, s'arrogent ou tentent d'obtenir légalement, le droit d'appliquer TOUS les préceptes de ce MÊME islam.
Ergoter entre « musulmans », « musulmans modérés », « musulmans laïques », « islamistes », « musulmans intégristes » ou « musulmans fondamentalistes » n'est qu'artifice de langage. On ne parle pas de « catholiques modérés », de « protestants laïques », de « boudhistes intégristes » ou autres. Cette multiplication de qualificatifs au bénéfice exclusif des musulmans, c'est de la poudre aux yeux pour berner les naïfs et les ignorants, ceux-là même qui croient encore que l'islam est une sorte de christianisme à la mode orientale tandis que le coran serait une manière de Bible écrite en langue arabe.
Nous allons toutefois céder à la mode en proposant nous aussi, à titre expérimental, de nouveaux termes permettant d'englober, de clarifier, et ,in-fine, de remplacer tous ceux qui précèdent :Mahométisme : doctrine pronant Mahomet comme prophète et beau modèle, le coran comme livre inimitable et parole de Dieu, l'islam comme religion et culture.
Mahométique : conforme au mahométisme.
Mahométiste : adepte du mahométisme.
Cette définition serait bien entendu incomplète sans les nuances typiques qu'affectionnent les intellectuels :
modéré : mahométiste pronant de ne pas contrevenir aux lois locales contrevenant les lois mahométiques, sauf si le rapport de force permet de se soustraire aux sanctions locales prévues.
intégriste : mahométiste pronant de contrevenir aux lois locales contrevenant les lois mahométiques, sauf si le rapport de force ne permet pas de se soustraire aux sanctions locales prévues.
mauvais : mahométiste intégriste ne sachant pas évaluer un rapport de force.
bon : mahométiste modéré sachant évaluer un rapport de force.
laïque : mahométiste ne sachant pas ce qu'est un rapport de force.
Mahométiser : convertir au mahométisme, appliquer la loi mahométique.
Mahométisation : action de mahométiser.
Tant que nous y sommes, voici quelques autres définitions à connaître, quoique peu usitées :
Mahométal : élaboré selon les rites mahométiques.
Mahométalal : forme désuète de "mahométal".
Mahométanique : aussi grand que Mahomet.
Mahométer : agir comme Mahomet.
Mahométhon : animation télévisée destinée à recueillir des fonds pour la recherche mahométique.
Mahométiagra : médicament paradisiaque.
Mahométissant : qui rend mahométique.
Mahométix : personnage légendaire ayant tenté sans succés de convertir au mahométisme un village d'irréductibles gaulois.
Mahométogyne : femme possèdant les caractéristiques sexuelles de Mahomet.
Mahométoïde : famille d'alcaloïdes canabiques lysergiques diéthylamides ecstasyques.
Mahométologie : science qui étudie Mahomet.
Mahométonique : qui fouette.
Mahométonyme : se dit d'une personne qui s'appelle mohammed ou muhammad.
Mahométopathie : système thérapeutique qui consisite à traiter les malades à l'aide du mahométisme.
Mahométopathe : mahométiste intégriste fou.
Mahométophage : qui bouffe du mahométiste.
Mahométophobe : crainte pathologique du mahométisme et des mahométistes.
Mahométorique : ensemble de procédés permettant de parler comme Mahomet.
Mahométrique : ensemble des mesures ayant pour base Mahomet.
Mahométrologie : science qui étudie les mensurations de Mahomet.
Mahométude : mahométisation des facultés intellectuelles.
Mais revenons à nos définitions officielles...
A « Mahomet », et toujours dans le même dictionnaire (Larousse 1905), on trouve la définition suivante :
MAHOMET, forme occidentale du nom du fondateur de la religion musulmane (en arabe Mohammed, « le Loué », participe de la seconde forme du verbe hamada}, né à La Mecque vers 571, mort à Médine en juin 632. il prétendait appartenir à la tribu des Koraïshites, l'une des plus importantes de l'Arabie, et qui, comme toutes les tribus arabes, se rattachait par une série de généalogies plus ou moins fictives à Ismaël, fils d'Abraham. Sa famille avait exercé les plus grandes charges religieuses et politiques à La Mecque, mais se trouvait alors à peu près ruinée. Le père de Mahomet, Abd-Allah, qui faisait le commerce par caravanes avec la Syrie, mourut vers 570, laissant sa femme Amina enceinte d'un fils qui fut Mahomet ; Amina elle-même mourut peu de temps après, et ce fut Abd-el-Mottalleb, père d'Abd-Allah, qui se chargea d'élever Mahomet ; pour tout héritage, ce dernier n'avait que cinq chameaux et une esclave éthiopienne. A la mort dAbd-el-Mottaleb, Mahomet fut recueilli par son oncle Abou-Taleb qui, comme Abd-Allah, faisait le commerce avec la Syrie. Mahomet avait treize ans quand Abou-Taleb l'emmena pour la première fois dans sa caravane. Au cours d'un de ses voyages en Syrie, Abou-Taleb laissa son neveu durant quelques semaines dans l'ermitage d'un moine chrétien nommé Bahira; c'est là que le futur prophète aurait acquis quelques notions sur le christianisme.
Entre temps, Mahomet avait suivi son oncle, qui commandait l'armée de La Mecque, dans une guerre contre quelques tribus voisines du territoire de la ville sainte. Il quitta le service d'Abou-Taleb pour prendre la direction du commerce d'une riche veuve de La Mecque, Khadidja, qui, séduite par ses qualités, l'épousa quoiqu'il n'eût que vingt-cinq ans, alors qu'elle était bien près d'atteindre la quarantaine. Mahomet, maître d'une grande fortune, secourut largement ceux qui l'avaient aidé, et en particulier son oncle Abou-Taleb. Il eut huit enfants de Khadidja, quatre lilles et quatre fils ; ces derniers moururent tous en bas âge. Le Prophète, mis en rapport avec les premiers citoyens de La Mecque et avec ceux qui ne partageaient pas les croyances idolâtriques de leurs compatriotes, se crut sans doute appelé à restaurer dans l'Arabie la religion monothéiste, que les Arabes supposaient avoir été celle d'Abraham; il est également possible que Mahomet ait été simplement un extatique, comme il y en a toujours eu en Orient. Vers quarante ans, il eut sa première révélation ; l'ange Gabriel lui apparut dans une caverne où il aimait à se retirer et, lui annonçant sa mission, lui révéla les six premiers versets de la 96e sourate du Koran.
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Le mouton qui blasphème – Par Fethi Benslama
Il y a quelque temps, le caricaturiste algérien Dilem mettait en scène, le jour de la fête du sacrifice, un mouton fuyant à toute vitesse, poursuivi par un homme brandissant un couteau. Dans la bulle, le mouton dit : « Mais pourquoi veulent-ils m’égorger ? Pourtant, je ne suis ni une femme ni un intellectuel. »
Voyez-vous, mesdames, messieurs, chers amis, ce mouton blasphème : non seulement il veut se soustraire à la place que lui assigne Dieu dans ses saintes écritures, lorsqu’il a voulu le substituer au fils du prophète Abraham, mais, de plus, ce mouton parle et, ce faisant, il brouille les frontières de la création divine entre l’homme et l’animal. La bête parle et fait de l’humour avec les affaires religieuses : c’est ignoble…
Il y a plus grave encore : en courant plus vite que l’homme qui veut le trucider, il ridiculise ce paisible musulman sacrifiant et humilie l’ensemble de la communauté musulmane, sinon la totalité des milliards de musulmans morts et vivants. Mais le pire n’est-il pas que ce mouton fuyant de peur devant un musulman qui veut le manger est de toute évidence islamophobe !
Se fondant sur cette lecture, même des années après, ce mouton insoumis pourrait voir, ce soir, au Théâtre du Soleil de la dite « Cartoucherie », se lever un imam spontané qui le cartouche d’une fatwa.
Nous verrons alors le MROPP (Mouvement pour Ramener les Ovins chez les Prédicateurs Paranoïaques) intenter un procès pour diffamation de sacrifiants ; tandis que la République, par ses voix les plus autorisées, présenterait ses excuses à tous les pratiquants modérés de méchouis sacrés, et les assurerait de son respect.
Merci, cher Dilem, d’avoir dessiné un mouton blasphémant, car tu m’as fourni ce soir la première page de mon propos, pour tenter de faire parvenir, le plus simplement, l’étonnement de ton mouton à ceux qui, aujourd’hui, ne veulent pas savoir, ne veulent pas comprendre, que voici des années, au nom de l’islam, tout est prétexte non seulement à interdire, à condamner, à excommunier, mais à éradiquer ce qui peut représenter l’« ironie de la communauté », la critique de son mythe, la désidentification à ses saintetés viriles et carnivores.
Voici des années que la tonsure de l’esprit arme le censure qui tue. Car la censure au nom de l’islam tue, sacrifie, grille au feu de l’Enfer et dévore les insoumis, afin de les soumettre à la religion de la soumission.
Par où commencerai-je la visite de ce mémorial invisible du trucide islamo-spasmophile ? Comment ferai-je pour nommer tous ceux qui, pour une plaisanterie, pour un article, pour un roman, pour un essai, ou simplement pour avoir été la fille, le fils, la sœur ou le frère de l’auteur, ont été transformés, par l’édit d’un commandeur des croyants, par un émir pétrolifère ou barbifique, par un chef de potent-état, par un imam sporadique, ou un illettré coranique fatwatant, transformé, disais-je, en moutons traqués, quand le couteau ou l’acide sulfurique de l’exécuteur ne les a pas rattrapés et anéantis. Comment nommer tous les anonymes de la fabrique des apostats ? Hélas, je ne le pourrai pas, le temps manque et la liste n’est pas établie – le sera-t-elle jamais ?
Je presse le pas et je me souviens que, pour l’époque actuelle, quelques années avant l’affaire Rushdie, déjà en 1985, le tribunal des mœurs du Caire avait condamné à la prison l’éditeur et l’imprimeur des Mille et Une Nuits, et ordonné l’autodafé sur la place publique de la voix de Shéhérazade.
Je me souviens qu’en 1988 paraît en Arabie Saoudite un livre qui jette l’anathème sur plus d’une centaine d’écrivains arabes morts ou vivants : Salama Moussa, Shibli Shmmayyil, Naguib Mahfouz, Lofti as-Sayyid, Muhammad al-Jabiri, Shakir Shakir, Saïd Aql, Adonis, etc.
Je me souviens qu’en 1989 le roman de Salman Rushdie, les Versets sataniques, est déclaré blasphématoire par Khomeyni, qui appelle au meurtre de l’auteur ainsi que tous les éditeurs du roman. Salman Rushdie, dont la vie pendant des années a été celle d’une bête traquée, a eu la chance de bénéficier de la protection de la police de son pays européen d’adoption.
Je me souviens que ses traducteurs italien et japonais furent tués, respectivement, à Milan et à Tokyo ; que le recteur de la Mosquée de Bruxelles et son adjoint, qui ont voulu trouver une issue théologique à la fatwa, ont été frappés par les services secrets iraniens en mars 1989. Souvenez-vous des autodafés du livre au cœur de l’Europe, d’intellectuels turcs brûlés vifs dans une maison où ils se sont réunis pour défendre l’écrivain.
Souvenez-vous encore que la fatwa n’a jamais été abrogée, et qu’il y a quelques jours, le chef du Hezbollah libanais avait déclaré que si cette fatwa contre Rushdie avait été exécutée, il n’y aurait pas eu de caricatures danoises. Mais, en fait, l’appel au meurtre contre Rushdie a ouvert une jurisprudence par laquelle il est devenu loisible à n’importe quel imam spontané de prononcer une sentence de mort à l’encontre de n’importe quel intellectuel supposé musulman renégat, n’importe où dans le monde.
Je me souviens que le 8 juin 1992 l’écrivain Farag Foda, quarante-sept ans, a été criblé de balles, qui ont atteint également son fils Ahmad, quinze ans, et Wahid Rafaat Zaki, un ami de ce dernier. Une déclaration d’Al-Djamaa al-Islamiya a revendiqué l’assassinat de Foda, accusé d’être un apostat, de préconiser la séparation de la religion et de l’État et de préférer le système légal en vigueur à l’application de la charia. En décembre 1992, sur ordre d’Al-Azhar et « au nom de l’islam, religion de l’État », les œuvres de Foda, rééditées en hommage, sont interdites et saisies.
Je me souviens que le 3 septembre 1992, sur la grande place de la ville de Qatif, en Arabie Saoudite, le poète Sadiq Melallah a été décapité au sabre par les autorités de ce pays, pour crime de blasphème et d’abjuration.
Je me souviens qu’à partir de 1993 s’ouvre en Algérie l’hécatombe des intellectuels et artistes : assassinats de Djilali Liabès, sociologue, Tahar Djaout, écrivain, du psychiatre Mohammed Boucebci, président du comité de vérité sur la mort du premier, M’hammed Boukhobza, sociologue, Merzag Baghtache, journaliste et écrivain, Saad Bakhtaoui, journaliste, Abderrahmane Chergou, écrivain et journaliste, Youssef Sebti, poète et écrivain, Abdelkader Alloula, dramaturge et metteur en scène, Bakhti Benaouda, écrivain, Ferhat Cherkit, Youssef Fathallah, Lamine Lagoui, Ziane Farrah, etc. La liste est encore longue.
Je me souviens que le 24 septembre 1994 un groupe d’islamistes du Bangladesh prononce une fatwa contre Taslima Nasreen, la condamnant pour blasphème et mettant sa tête à prix, et que, sous la pression des manifestations islamistes, les autorités lancent un mandat d’arrêt contre elle, en juin 1994.
Je me souviens que le 14 octobre 1994 Naguib Mahfouz, quatre-vingt-trois ans, Prix Nobel de littérature, est poignardé à la gorge, au Caire, par un jeune intégriste.
Je me souviens que le 21 juin 1995 a été lancée l’accusation d’apostat contre Nasr Hamed Abu Zeid, professeur d’Université – ce qui signifie la mort – et qu’une cour d’appel du Caire avait conclu le 14 juin 1995 que cet homme avait insulté l’islam dans ses écrits, qu’il devait se séparer de son épouse car celle-ci, musulmane, ne pouvait rester mariée à un « apostat ». La cour de cassation du Caire a confirmé cet arrêt en août 1996. Un mois plus tard, le tribunal des référés de Guizeh a ordonné un « sursis à exécution », mais un avocat islamiste a interjeté appel de cette décision, qui a été confirmée en décembre 1996 par un autre tribunal.
Je me souviens qu’en avril 2000 l’écrivain Haydar Haydar a été déclaré apostat et qu’il fut condamné à mort pour son roman Festin pour les algues marines, publié sept ans plutôt à Chypre, parce que l’un des personnages de son roman disait : « Les lois des divinités bédouines, l’enseignement du Coran, c’est de la merde. » Après la condamnation pour une fiction de blasphème, à quand le meurtre pour blasphème inconscient ?
Je me souviens, je me souviens, je me souviens… J’arrête cette litanie au début du IIIe millénaire, car je voudrais vous inviter à découvrir par vous-même le long rouleau des traqués, des apostasiés, des condamnés, des assassinés, pour peu que vous osiez taper sur la Toile ces quelques mots : islam, meurtre, fatwa, censure – dans n’importe quel ordre. Vous découvrirez peut-être que certains noms qui vous sont un peu familiers, dont quelques-uns sont parmi nous ce soir, sont promis au gibet, le jour de leur arrivée au pouvoir, par des chefs islamistes réfugiés politiques dans telle ou telle capitale européenne. Je vous prie alors de ne pas les appeler pour leur dire : Quel courage ! Car, c’est là que se produit cette attaque de panique où ils commenceront à avoir peur de leur peur.
Non, ce n’est pas de ce genre de soutien dont ils ont besoin aujourd’hui, mais de votre résistance au piège auquel collaborent tant de démocrates et hommes de gauche européens qui, dans leur lutte contre le racisme, en sont venus à oublier la censure qui tue. Car une nouvelle machine a été depuis inventée, celle du « musulman humilié » : une machine infernale, puisque alimentée par une réalité certaine de mépris et des droits bafoués ici et là, tendant à justifier et à armer le mythe identitaire qui veut, au nom du sacré, poursuivre l’éradication de tout écart à la communauté des croyants, et légaliser, par les descendants de la révolution des libertés, l’empêchement de parler, d’écrire, de dessiner.
Dans les périodes les plus sombres de leur histoire, quand le colonialisme faisait régner son ordre de mépris et de négation des droits les plus élémentaires, les musulmans n’ont jamais considéré que leur Dieu était « humiliable », ni que les figures idéales de leur culture pouvaient être facilement diffamées : leur lutte pour leur dignité faisait simplement appel à l’égalité des droits, et non à la fabrique de la vengeance aveugle de l’« humiliation » – une notion inventée en Europe, qui appartient au lexique ecclésiastique de l’abaissement, de la honte, de la mortification, bref, à l’imaginaire de l’orgueil. Quand on tue des civils en masse, quand on égorge des hommes devant la télévision au nom de l’islam, n’est-ce pas là l’atteinte la plus grave contre laquelle les musulmans devraient protester ? Combien l’ont-ils fait ?
Le combat antiraciste pour le droit et l’égalité est aujourd’hui détourné, par le faux aiguillage de l’humiliation, vers la défense des mythes identitaires les plus terrifiants, vers le soutien à la religiosité des paranoïaques criminels, dont il blanchit les méfaits, en faisant de ses prédicateurs des victimes de notre liberté de penser, de parler et d’écrire. Nous parvenons aujourd’hui à cette situation de ségrégation où un homme ou une femme de culture musulmane a moins de légitimité à critiquer l’islam que des Européens de le faire pour le christianisme ou le judaïsme. Les premiers seront soupçonnés ou accusés d’« islamophobie », d’être les alliés objectifs de la droite raciste, alors que les seconds ne feraient qu’exercer un droit évident. Certains descendants des Lumières sont devenus aveugles aux lumières des autres.
Profitant de la supposée humiliation par les caricatures du Prophète, du supposé blasphème de personnes qui ne partagent pas la croyance des musulmans (peut-il y avoir blasphème là ou il n’y a pas croyance ?), les cinquante-sept pays de l’Organisation de la conférence islamique (OCI) viennent de demander que le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, voué à remplacer la Commission des droits de l’homme de Genève, d’inscrire dans son texte fondateur l’article suivant : « La diffamation des religions et des prophètes est incompatible avec le droit à la liberté d’expression. »
Ils proposent de donner mandat au nouvel organisme de « promouvoir le respect universel de toutes les religions et valeurs culturelles », et de « prévenir les cas d’intolérance, de discrimination, d’incitation à la haine et à la violence [...] contre les religions, les prophètes et les croyances ». L’amendement de l’OCI précise que les attaques contre les religions causent des « dissonances sociales qui conduisent à des violations des droits de l’homme ».
Croyez-moi, même si cette proposition ne sera pas retenue, il en restera quelque chose. Elle est, en tout cas, le symptôme de la perversion, à l’œuvre aujourd’hui, qui veut que les droits de l’homme et le combat anti-raciste deviennent les défenseurs de l’idéologie islamiste et de sa censure qui tue.
* « Le Manifeste des Libertés » à la Cartoucherie de Vincennes, Théâtre du Soleil, Mars 2006. Fethi Benslama est professeur de Psychopathologie à l’Université Paris-VII
Source : http://www.manifeste.org
Cette intervention* date du mois de mars 2006. Son contenu reste hélas d’actualité.
Je l’ai choisi pour vous, pour introduire à mon prochain article qui sera intitulé « Le stalinisme mystique tisse sa toile à Villeneuve d’Ascq« .
A suivre sur ce blog après la fête du sacrifice. Cette journée durant laquelle des centaines de millions de moutons seront égorgés de manière quasi-mécanique en livrant à ces centaines de millions de sacrifiants, une quantité considérable de viande à congeler.
Cependant, le sens d’un tel acte continuerait à échapper à la majorité de ceux qui l’observent. Le jour où l’on comprendra mieux sa signification et où l’on cernera davantage sa profondeur, ce jour-là, on cessera, je le pense, d’égorger ces centaines de millions de bêtes et on célébrera, sans égorger aucun mouton, et tous les jours de l’année, l’authentique valeur ajoutée de cette fête.
En attendant, joyeuse fête à toutes et à tous !
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