• Mon Pays

    Mon Pays

    S’il me fallait, au monde, présenter mon pays
    Je dirais la beauté, la douceur et la grâce
    De ses matins chantants, de ses soirs glorieux
    Je dirais son ciel pur, je dirais son air doux
    L’étagement harmonieux des mornes bleuissant
    Les molles ondulations de ses collines proches
    L’émeraude changeant des cannes au soleil
    Les cascatelles glissant entre les grosses pierres :
    Diaphanes chevelures entre des doigts noueux
    Et les soleils plongeant dans des mers de turquoise
    Je dirais, torches rouges tendues au firmament,
    La beauté fulgurante de flamboyants ardents,
    Et ce bleu, et ce vert, si doré si limpide
    Qu’on voudrait dans ses bras serrer le paysage

    Je dirais le madras de la femme en bleu
    Qui descend le sentier son panier sur la tête,
    L’onduleux balancement de ses hanches robustes
    Et la mélopée grave des hommes dans les champs
    Et le moulin grinçant sous la lune la nuit,
    Les feux sur la montagne à mi-chemin du ciel.
    Le café qu’on recueille sur les sommets altiers,
    L’entêtante senteur des goyaves trop mûres.
    Je dirais dans les villes, les torses nus et bronzés
    De ceux qui dans la rue sous la dure chaleur

    Mais j’enflerais ma voix d’une ardeur plus guerrière
    Pour dire la vaillance de ceux qui l’ont forgé
    Je dirais la leçon qu’au monde plus qu’étonné
    Donnèrent ceux qu’on croyait des esclaves soumis
    Je dirais la fierté, je dirais l’âpre orgueil,
    Présents qu’à nos berceaux nous trouvons déposés

    Et le farouche amour que nous portons en nous
    Pour une liberté au prix trois fois sanglant
    Et le bouillonnement montant dans nos artères
    Lorsqu’au fond de nos bois nous entendons, l’appel
    Du conique tambour que nos lointains ancêtres
    Ont porté jusqu’à nous des rives de l’Afrique :
    Mère vers qui sans cesse sont tournés nos regards !
    S’il me fallait, au monde, présenter mon pays,
    Je dirais plus encore, je dirais moins encore,
    Je dirais ton cœur bon, ô peuple de chez nous

    « Salem Ben AmmarPoesies »

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